Conservation d’un échantillon des produits stupéfiants saisis avant leur destruction : La première phrase du premier alinéa de l’article 706-30-1 du code de procédure pénale est conforme à la constitution.

Dans sa décision n° n° 2023-1067 QPC[1] du 10 novembre 2023 ; le Conseil constitutionnel a eu à décider que :
La première phrase du premier alinéa de l’article 706-30-1 du code de procédure pénale, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, est conforme à la Constitution.
I-Que prévoit du premier alinéa de l’article 706-30-1 du code de procédure pénale ?
Lorsqu’il est fait application des dispositions du quatrième alinéa de l’article 99-2 à des substances stupéfiantes saisies au cours de la procédure, le juge d’instruction doit conserver un échantillon de ces produits afin de permettre, le cas échéant, qu’ils fassent l’objet d’une expertise. Cet échantillon est placé sous scellés.[2]
II-Quels sont les reproches faits à ces dispositions ?
v Une méconnaissance des droits de la défense, du droit à un procès équitable et du principe d’égalité devant la justice.
Réserver au cadre de l’information judiciaire l’obligation de conserver un échantillon des produits stupéfiants saisis avant leur destruction et de priver ainsi le prévenu cité à comparaître au terme d’une enquête de police de la possibilité de contester la nature de ces produits devant la juridiction de jugement.
Le législateur aurait en outre méconnu l’étendue de sa compétence dans des conditions affectant les droits et principe précités.
III-Réponse du Conseil constitutionnel
v La personne intéressée est mise en mesure de contester les conditions dans lesquelles ont été recueillis les éléments de preuve qui fondent sa mise en cause.
D’une part, il résulte de l’article 41-5 du code de procédure pénale que, dans le cadre d’une enquête préliminaire ou de flagrance, seuls les produits dont la conservation n’est plus nécessaire à la manifestation de la vérité peuvent être détruits. La décision prise par le procureur de la République est motivée et notifiée par tout moyen notamment à la personne mise en cause. Cette dernière peut former un recours suspensif devant la chambre de l’instruction.
D’autre part, devant la juridiction de jugement, conformément à l’article 427 du code de procédure pénale, la preuve de la nature des produits saisis peut être rapportée par tout moyen et le juge ne peut fonder sa décision que sur des éléments qui lui sont apportés au cours des débats et contradictoirement discutés devant lui. Dans ce cadre, il appartient au ministère public de rapporter la preuve de l’ensemble des éléments constitutifs de l’infraction.
v Sont assurées aux personnes mises en cause, qu’elles soient jugées à l’issue d’une information judiciaire ou d’une enquête, des garanties équivalentes.
D’une part, Il résulte de la combinaison des dispositions de l’article 6 de la Déclaration de 1789, la loi « doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse » ; avec celles de l’article 16 de la Déclaration de 1789 que, si le législateur peut prévoir des règles de procédure différentes selon les faits, les situations et les personnes auxquelles elles s’appliquent, c’est à la condition que ces différences ne procèdent pas de distinctions injustifiées et que soient assurées aux justiciables des garanties égales.
D’autre part, eu égard notamment à la gravité ou la complexité des faits susceptibles de justifier l’ouverture d’une information judiciaire, les personnes renvoyées devant une juridiction de jugement à l’issue d’une instruction ouverte du chef de trafic de stupéfiants sont dans une situation différente de celle des personnes citées à comparaître à l’issue d’une enquête préliminaire ou de flagrance.
[1] – https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2023/20231067QPC.htm
[2] – https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000023718471