Sabine Ndzengue
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« Les propriétaires ou les exploitants d’immeubles à usage d’habitation ou leurs représentants (…) peuvent accorder à la police municipale une autorisation permanente de pénétrer dans ces mêmes parties communes » est conforme à la constitution

Dans sa décision n° 2023-1059 QPC[1] du 14 septembre 2023, le Conseil constitutionnel a eu à décider que l’article L. 272-1 du code de la sécurité intérieure est conforme à la constitution.

I-Que prévoit l’article L. 272-1 du code de la sécurité intérieure ?

« Les propriétaires ou les exploitants d’immeubles à usage d’habitation ou leurs représentants s’assurent que les services de police et de gendarmerie nationales ainsi que les services d’incendie et de secours sont en mesure d’accéder aux parties communes de ces immeubles aux fins d’intervention.
« Ils peuvent accorder à la police municipale une autorisation permanente de pénétrer dans ces mêmes parties communes ». 

II-Quels sont les reproches faits aux dispositions de cet article

  • Ces dispositions méconnaîtraient dès lors le droit au respect de la vie privée ainsi que le droit de propriété et seraient entachées d’incompétence négative dans des conditions affectant ces droits
  • Reconnaître aux services de police et de gendarmerie nationales un droit d’accès permanent aux parties communes des immeubles d’habitation, alors qu’il s’agit de lieux privés qui pourraient constituer une partie d’un domicile.
  • Imprécision de la notion d’« intervention » et l’absence d’encadrement des conditions dans lesquelles les propriétaires sont tenus d’assurer cet accès aux parties communes.

III-Réponse du Conseil Constitutionnel

En adoptant ces dispositions, le législateur a entendu permettre aux forces de l’ordre d’accéder en permanence aux parties communes des immeubles à usage d’habitation dans le cadre de leurs missions d’urgence et de protection des personnes et des biens. Il a ainsi poursuivi les objectifs de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l’ordre public et de recherche des auteurs d’infractions.

Si les dispositions contestées reconnaissent aux forces de l’ordre un droit d’accès à ces parties communes aux fins d’intervention, elles n’ont pas pour objet et ne sauraient avoir pour effet de leur permettre d’accéder à ces lieux pour d’autres fins que la réalisation des seuls actes que la loi les autorise à accomplir pour l’exercice de leurs missions.

Ce n’est que dans le cas où les services de police et de gendarmerie nationales interviennent dans le cadre d’une opération de police judiciaire, notamment lors d’une enquête préliminaire, que les actes d’investigation prévus par le code de procédure pénale peuvent, le cas échéant, être mis en œuvre et ils ne peuvent l’être que sous le contrôle d’un magistrat du parquet auquel il revient, en application de l’article 39-3 du code de procédure pénale, d’en contrôler la proportionnalité au regard de la nature et de la gravité des faits. En outre, l’article 706-95-12 du même code subordonne la mise en œuvre de certaines techniques spéciales d’enquête à une autorisation d’un magistrat du siège.

Les services de police et de gendarmerie nationales sont autorisés à accéder uniquement aux parties communes des immeubles à usage d’habitation, qui, en vertu de l’article 3 de la loi du 10 juillet 1965 mentionnée ci-dessus, sont constituées des bâtiments et terrains affectés à l’usage et à l’utilité de tous les copropriétaires ou de plusieurs d’entre eux. Les dispositions contestées ne leur permettent donc pas d’accéder à des lieux susceptibles de constituer un domicile.


[1] https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2023/20231059QPC.htm

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