Sabine Ndzengue
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Lutte contre le gaspillage et économie circulaire : L’interdiction d’étiquetage des fruits et légumes est conforme à la Constitution

Dans sa décision n° 2023-1055 QPC[1] du 16 juin 2023 ; Le Conseil Constitutionnel a décidé que : Les dispositions de L’article 80 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire sont conformes à la Constitution.

I-Que prévoit l’article 80 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire ?

« Au plus tard le 1er janvier 2022, il est mis fin à l’apposition d’étiquettes directement sur les fruits ou les légumes, à l’exception des étiquettes compostables en compostage domestique et constituées en tout ou partie de matières biosourcées ».

II-Quels sont les reproches faits à ces dispositions ?

Ø  Elles porteraient ainsi une atteinte disproportionnée à la liberté d’entreprendre.

En Limitant la faculté pour tout opérateur économique d’apposer des étiquettes sur les fruits et légumes aux seules fins de faciliter le compostage domestique, alors qu’existeraient d’autres moyens moins contraignants pour y parvenir.

Ø  méconnaissance du principe d’égalité devant la loi.

instituer une double différence de traitement injustifiée, d’une part, entre opérateurs selon que les fruits et légumes sont produits en France ou importés et, d’autre part, entre les exportateurs français et leurs concurrents à l’étranger.

Ø  ces dispositions seraient contraires au principe de légalité des délits et des peines.

Faute de définir en des termes suffisamment clairs et précis l’interdiction édictée, alors que sa méconnaissance serait punie d’une amende contraventionnelle

  • Ces dispositions seraient enfin entachées d’incompétence négative dans des conditions affectant les exigences constitutionnelles précitées, et méconnaîtraient l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi.

III-Réponse du Conseil Constitutionnel

  • il est loisible au législateur d’apporter à la liberté d’entreprendre, qui découle de l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, des limitations liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l’intérêt général, à la condition qu’il n’en résulte pas d’atteintes disproportionnées au regard de l’objectif poursuivi.
  • Le législateur a poursuivi l’objectif de valeur constitutionnelle de protection de l’environnement.

Le législateur a entendu favoriser le compostage des biodéchets et la réduction des déchets plastiques pour mettre en œuvre les objectifs de réduction et de valorisation des déchets ménagers.

Il n’appartient pas au Conseil constitutionnel de rechercher si les objectifs que s’est assignés le législateur auraient pu être atteints par d’autres voies, dès lors que les modalités retenues par la loi ne sont pas manifestement inappropriées à l’objectif visé.

Ø  Le législateur a apporté aux conditions d’exercice de l’activité économique des entreprises commercialisant des fruits et légumes une restriction qui n’est pas manifestement disproportionnée au regard de l’objectif poursuivi.

l’interdiction édictée par ces dispositions porte sur l’apposition des seules étiquettes qui ne sont pas compostables et constituées en tout ou partie de matières biosourcées. En déterminant ainsi la portée de cette interdiction

  • Le grief tiré de la méconnaissance du principe d’égalité devant la loi doit donc être écarté.

les dispositions contestées, qui interdisent de mettre en vente en France des fruits et légumes sur lesquels sont apposées des étiquettes non compostables, n’instituent aucune différence de traitement selon qu’ils sont produits en France ou importés.

Ø  La circonstance que le pouvoir réglementaire ait sanctionné d’une contravention le manquement à l’interdiction prévue par les dispositions contestées ne saurait leur conférer un tel objet.

les dispositions contestées n’ont, par elles-mêmes, pour objet ni d’instituer une sanction ayant le caractère d’une punition ni de définir les éléments constitutifs d’une infraction.

Ø  La méconnaissance du principe de légalité des délits et des peines ne peut qu’être écarté comme inopérant.

Il appartient au demeurant au pouvoir réglementaire, dans l’exercice de la compétence qu’il tient de l’article 37 de la Constitution et sous le contrôle des juridictions compétentes, de définir les éléments constitutifs des contraventions en des termes suffisamment clairs et précis.


[1]https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2023/20231055QPC.htm