Amélioration de l’accès à la prestation de compensation du handicap : Le deuxième alinéa et les mots « peuvent participer au financement du fonds » sont conformes à la constitution !

Dans sa décision n° 2023-1039[1] QPC du 24 mars 2023, le Conseil d’État a décidé que :
Le deuxième alinéa et les mots « peuvent participer au financement du fonds » figurant au troisième alinéa de l’article L. 146-5 du code de l’action sociale et des familles, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2020-220 du 6 mars 2020 visant à améliorer l’accès à la prestation de compensation du handicap, sont conformes à la Constitution.
I-Que prévoient les dispositions des : deuxième et troisième alinéa de l’article L. 146-5 du code de l’action sociale et des familles ?
- Dans la limite des financements du fonds départemental de compensation, les frais de compensation ne peuvent excéder 10 % des ressources personnelles nettes d’impôts des personnes handicapées mentionnées au premier alinéa du présent article, dans des conditions définies par décret.
- Le département, l’Etat, les autres collectivités territoriales, les organismes d’assurance maladie, les caisses d’allocations familiales, les organismes régis par le code de la mutualité, l’association mentionnée à l’article L. 323-8-3 du code du travail, le fonds prévu à l’article L. 323-8-6-1 du même code et les autres personnes morales concernées peuvent participer au financement du fonds. Une convention passée entre les membres de son comité de gestion prévoit ses modalités d’organisation et de fonctionnement.
II-Reproches faits aux dispositions des 2ème et 3ème alinéa de l’article L. 146-5 du code de l’action sociale et des familles
v Une méconnaissance d’un « principe de solidarité et d’accessibilité de la société aux personnes handicapées »
Maintenir à la charge des personnes handicapées des frais pouvant représenter jusqu’à 10 % de leurs ressources personnelles.
Ce plafond peut en outre ne pas être respecté dès lors que ces aides sont accordées dans la limite des financements disponibles et que les contributions à ces fonds ne sont pas obligatoires.
v Méconnaissance des principes de fraternité et de sauvegarde de la dignité de la personne humaine, et des exigences découlant du onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946.
- Des différences de traitement injustifiées entre les personnes handicapées selon le fonds départemental dont elles dépendent, entre les personnes handicapées et les bénéficiaires d’autres prestations sociales, et entre les personnes handicapées et les personnes qui ne sont pas en situation de handicap.
III-Réponses du Conseil constitutionnel
Aux termes des dixième et onzième alinéas du Préambule de la Constitution de 1946 : « La Nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement. – Elle garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l’incapacité de travailler a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence ».
- Les exigences constitutionnelles résultant de ces dispositions impliquent la mise en œuvre d’une politique de solidarité nationale en faveur des personnes handicapées. Il est cependant possible au législateur, pour satisfaire à ces exigences, de choisir les modalités concrètes qui lui paraissent appropriées.
Le législateur a entendu améliorer la prise en charge des conséquences du handicap en confiant aux fonds départementaux le versement d’aides facultatives, en complément des montants reçus au titre de la prestation de compensation.
- Dans ce cadre, il était loisible au législateur de ne prévoir qu’un objectif non contraignant de réduction des frais de compensation restant à la charge des personnes handicapées après qu’elles ont bénéficié de la prestation obligatoire due au titre de l’article L. 245-1 du code de l’action sociale et des familles et de ne pas imposer aux contributeurs des fonds départementaux un financement obligatoire.
L’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : la loi « doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse ». Le principe d’égalité ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général, pourvu que, dans l’un et l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l’objet de la loi qui l’établit.
- Les personnes handicapées qui bénéficient des aides financières versées par les fonds départementaux de compensation sont, au regard de l’objet des dispositions de l’article L. 146-5 du code de l’action sociale et des familles, placées dans une situation différente de celles des bénéficiaires d’aides sociales obligatoires reposant sur la solidarité nationale et des personnes qui ne sont pas en situation de handicap.
- Le législateur a pu permettre à ces fonds départementaux d’accorder des aides financières facultatives sans méconnaître le principe d’égalité.
[1] -https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2023/20231039QPC.htm