Sabine Ndzengue
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Responsabilité pour Défaut d’entretien normal de l’ouvrage public : Que prévoit le législateur ?

Dans l’arrêt N°20BX01721[1], CAA de Bordeaux, 2ème chambre, 17/11/2022, le Défaut d’entretien normal de l’ouvrage public serait dû à un mauvais fonctionnement de l’éclairage et à la hauteur excessive des trottoirs.

Dans les faits de l’espèce, Le 19 février 2015, M. O… T…, né en 1932, a fait une chute sur la voie publique sur la commune de Sarlat-la-Canéda, à l’origine de son décès.

Sa veuve, ses quatre enfants et ses dix petits-enfants ont saisi le tribunal administratif de Bordeaux afin d’obtenir la condamnation de la commune à réparer leur préjudice.

Il résulte de l’instruction, et notamment de l’enquête de gendarmerie, que M. T… qui venait de se rendre dans une pharmacie et regagnait son véhicule, a été retrouvé inanimé, aux alentours de 19 heures 30, sur la chaussée de la rue Victor Hugo, située dans le secteur sauvegardé du centre-ville de Sarlat-la-Canéda. En arrêt cardio-respiratoire, il a pu être ranimé par les services de secours avant de décéder, deux jours plus tard, au centre hospitalier de Périgueux, d’une  » tétraplégie traumatique (rupture de l’odontoïde) dans le cadre d’une chute probable de sa hauteur avec traumatisme facial « . A l’endroit de la chute, le trottoir, délimité par des blocs de pierre de couleur foncée qui ne se distinguent pas à cette heure-là de la couleur du revêtement de la chaussée, est d’une hauteur de vingt centimètres. Il ressort également des différents témoignages recueillis, tous concordants sur ce point, que la rue était particulièrement sombre à cet endroit, au point que les phares du véhicule de secours ont dû être utilisés pour éclairer le lieu de l’accident et la victime. Les comptes rendus de l’agent des services municipaux et les interventions de la société en charge de la maintenance font apparaître que plusieurs des éclairages publics au gaz étaient défaillants et ne fonctionnaient qu’à un tiers de leur capacité le jour de l’accident. La circonstance qu’un agent assure une surveillance mensuelle de ces éclairages et que, lors du contrôle réalisé le mois précédent, les lampadaires de cette rue de centre-ville n’étaient pas défectueux, ne saurait suffire à établir un entretien normal de l’ouvrage public. Dans ces conditions, le défaut d’entretien normal de l’ouvrage ainsi que le lien direct et certain avec le dommage sont établis.

Contrairement à ce que soutient la commune, il n’est pas établi que la chute dont a été victime M. T… serait le résultat d’une séance d’ostéopathie suivie quelques heures plus tôt, ou du port de lunettes. En revanche, habitant la commune et connaissant très bien les lieux, M. T… a manifestement manqué de prudence, alors qu’il se déplaçait à la nuit tombée. Cette faute de la victime est de nature à exonérer la commune de sa responsabilité, non pas à hauteur de 50 % comme l’ont retenu les premiers juges, mais de 25 %.

La preuve de la responsabilité doit être apportée par l’usager

Il appartient à l’usager d’un ouvrage public qui demande réparation du dommage qu’il estime avoir subi du fait de cet ouvrage d’apporter la preuve de l’existence d’un lien de causalité direct et certain entre ce dommage et l’ouvrage. Le maître de l’ouvrage ne peut être exonéré de l’obligation d’indemniser la victime qu’en apportant la preuve, soit de l’absence de défaut d’entretien normal, soit que le dommage est imputable à une faute de la victime ou à un cas de force majeure.


[1]https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000046575959?dateDecision=&dateVersement=&isAdvancedResult=&juridiction=CONSEIL_ETAT&juridiction=COURS_APPEL&juridiction=TRIBUNAL_ADMINISTATIF&juridiction=TRIBUNAL_CONFLIT&page=2&pageSize=10&pdcSearchArbo=&pdcSearchArboId=&query=*&searchField=ALL&searchProximity=&searchType=ALL&sortValue=DATE_DESC&tab_selection=cetat